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Géraldine Savary: «On tente la première année de médecine»

Edito Geraldine Savary redactrice en chef Femina

«Là, nous en sommes aux maladies infantiles orphelines que je découvre chaque matin en me lavant les dents.»

© ELSA GUILLET

Ma fille est en examen. Et du coup, nous aussi. Nous tentons la première année de médecine. Merci de votre soutien et de votre compréhension, parce que c’est vraiment dur. Nous sommes fatigués, inquiets, nous mangeons à des heures impossibles, vivons au milieu des polycopiés médicaux scotchés sur les murs de l’appartement. Là, nous en sommes aux maladies infantiles orphelines que je découvre chaque matin en me lavant les dents. Bientôt, les résultats tomberont comme un couperet. Soit vous êtes dans les deux cent vingt premiers, soit vous refaites l’année.

Comme parents, nous vivons au rythme de ces épreuves. On chuchote, on crapule dans le garage histoire de ne pas déranger, on regarde des séries en mode silencieux sous-titré pour ne pas réveiller le cerveau qui dort à côté. Notre amour se limite à demander: «Alors, la journée s’est bien passée?» À ranger la chambre, à préparer des tupperwares, à s’assurer que le frigo est plein. On ne fait aucune remarque négative ou critique, on essaie de trouver le ton qui encourage sans mettre la pression. Globalement, avouons-le humblement, on ne sert à rien.

Apprendre des formules chimiques complexes

C’est aussi à ce moment-là qu’on se rend compte que notre enfant n’en est plus vraiment un: quand il parvient à faire des choses qu’on ne saurait pas ou plus faire soi-même. Comme par exemple, travailler sept jours sur sept jusqu’à 22 heures, apprendre des formules chimiques complexes, connaître le nom d’un tas de petits os que même votre propre corps ignore, analyser des morceaux de cadavres.

Les rôles s’inversent: je me sens coupable quand je pars au travail pour huit heures, j’ai l’impression d’être une feignasse à me la couler douce le week-end, j’ai honte d’avoir une vie si cool, comme si l’adulte que j’étais vivait comme l’adolescente qu’elle est. Comment est-il possible que le chérubin à qui nous apprenions à marcher et à prononcer ses premiers mots, il y a à peine quelques minutes, se retrouve soudain à en savoir plus que vous?

Ça donne le vertige, et force l’admiration. Tous les jours, comme tous les parents en cette fin d’année scolaire, je regarde mes filles partir vers les échéances qui les attendent. Elles ont le regard grave et responsable, jouant leur avenir sur quelques QCM, une mauvaise nuit, une compo à écrire. La vie est si sérieuse à vingt ans.

Retrouvez cet édito dans le magazine «Femina» du 16 juin 2024.

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