Margot Robbie: Normaliser la prise de poids de la grossesse

Juillet 2024. Tandis qu’elle passe des vacances en Italie avec son amoureux, l’actrice et productrice australienne Margot Robbie se fait soudainement démolir sur les réseaux sociaux après la publication de photos volées d’elle enceinte. Entre autres joyeusetés dénoncées, entre autres, par le compte Instagram LacheTonAssiette, des commentaires qui vont de «son corps est ruiné» à «pas sexy», en passant par d’hyperdélicats «c’est dégueu» ou «elle est grosse». En clair, ces internautes lui reprochent ses changements corporels en général et sa prise de poids en particulier. On croit rêver. Ou cauchemarder, plutôt.

Cela dit, au-delà des injonctions sexistes et patriarcales qu’impliquent ces détestables jugements, ils soulignent aussi une méconnaissance absolue de la nature. Histoire de remettre les choses à leur place, petite mise au point en compagnie de la Dre Hélène Legardeur, médecin adjointe en obstétrique au CHUV, à Lausanne.

Neuf mois mais… combien de kilos?

Comme le précise la Dre Legardeur, tout dépend: «Les recommandations ne sont pas les mêmes selon le poids de base de la future maman», explique-t-elle. Concrètement, en surpoids, mieux vaut rester dans une fourchette de +7 à 10 kilos, voire moins chez les patientes obèses. Avec un poids normal, il est conseillé de prendre de 12 à 16 kilos. «En revanche, les femmes qui sont en sous-poids ou en tout cas un petit peu en dessous des standards du BMI (ou IMC, soit le rapport entre le poids et la taille puisque peser 80 kg n’est pas la même chose selon qu’on mesure 1,40 m ou 1,85 m!), ce qui peut tout à fait être le cas d’une actrice ayant interprété Barbie, devraient viser plutôt de 13 à 18 kilos pour couvrir les besoins de la grossesse et de l’enfant.»

À quel moment prend-on du poids?

Là encore, impossible de généraliser. Dans les faits, si certaines femmes restent dans une augmentation pondérale progressive relativement stable et constante, d’autres prennent plus de kilos en début de grossesse. Ce qui s’explique simplement: «Les malaises et nausées sont plus fortement ressentis le ventre vide. Pour calmer ces sensations, elles mangent donc davantage que d’habitude – avec le risque de prendre pas mal de poids. Dans ce genre de situation, nous conseillons de fractionner les repas sur la journée afin que l’estomac soit en effet rempli, mais pas forcément trop plein», note la Dre Legardeur.

Elle ajoute: «Souvent, au 2e trimestre, les choses se stabilisent pour ces patientes-là.» Et quid du 3e trimestre, au cours duquel la plupart des mamans ont l’impression de particulièrement enfler? La prise de poids est en effet plus importante – environ 1,5 kg. Elle est due au bébé, évidemment, mais aussi à des éventuels sur-apports caloriques et/ou à une possible rétention d’eau.

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Une grossesse 0 kilo, c’est possible?

Comme le note la Dre Legardeur, «c’est possible et recommandé pour les patientes obèses avec un BMI > 40 kg/m2. Mais cela nécessite un suivi extrêmement rigoureux car des modifications importantes surviennent pendant la grossesse», lesquelles vont augmenter le poids:

– Le développement progressif du placenta, «plateforme» d’échanges mère-enfant, qui pèse environ 500 à 600 g en fin de grossesse.

– Le liquide amniotique, dont le volume varie de 0,5 à plus d’un litre.

– Les seins, qui se développent pour se préparer à l’allaitement.– Le volume sanguin, qui augmente de 40 à 50%.– Les réserves de graisse qui s’accumulent dans le corps.– Une éventuelle rétention d’eau, qui peut peser lourd sur la balance. – Le poids du bébé qui augmente lui aussi au fil des semaines. À noter qu’à la sortie de la maternité, une jeune maman aura généralement perdu «quatre à cinq kilos», indique la Dre Legardeur.

Manger pour deux? Oui, mais non!

Manger, oui, «faire n’importe quoi», non, souligne Hélène Legardeur. Elle précise: «Si se nourrir – idéalement de manière équilibrée! – est bien entendu indispensable à la mère et à l’enfant, cela ne veut pas dire qu’il faut pour autant doubler son apport calorique journalier. En fait, il ne faudrait d’ailleurs pas le modifier les trois premiers mois puis l’augmenter légèrement – à savoir d’environ 250 kcal au 2e trimestre (ce qui représente une tranche de pain et un morceau de fromage) et de 500 kcal au 3e.» Elle reprend: «Évidemment, nous devons tenir compte de l’alimentation habituelle des futures mamans – ne serait-ce que pour savoir s’il leur faut éventuellement des supplémentations vitaminiques ou autres – et nous insistons sur l’importance d’avoir une activité physique. Mais une chose est claire: en termes de quantités, on doit vraiment sortir de cette culture du manger pour deux.»

D’une part, pour des questions de santé puisque plus on prend du poids, plus on augmente les risques de complications pendant la grossesse et à l’accouchement. Et d’autre part, pour mieux vivre l’après-naissance, insiste la Dre Legardeur. En substance, dit-elle, en plus de se retrouver confrontée à tous les bouleversements du quotidien et aux grands huit émotionnels et hormonaux induits par une naissance, il faudrait encore accepter de ne plus reconnaître son corps à cause des 20 kilos qu’on a pris? Même si l’on n’est pas esclave de l’image, l’affaire n’est pas simple à gérer – et ce n’est rien de le dire. En d’autres termes, autant prévenir les problèmes en amont en essayant de s’en tenir aux recommandations de prises de poids… tout en fermant ses réseaux sociaux comme l’a fait Margot Robbie!