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Vie d'expat: Joëlle Comé dirige l’Institut suisse de Rome

Vie dexpat elle dirige linstitut suisse de rome

Cet été 2024, nous donnons la parole à des Suissesses qui vivent hors de la frontière. Ici, Joëlle Comé, qui vit à Rome avec son mari et son fils depuis 2016.

© DAVID PALMIERI

En 2016, j’étais responsable des affaires culturelles à l’État de Genève depuis 9 ans. Le poste de direction de l’Institut suisse de Rome se libère. J’y ai vu une magnifique possibilité de vivre dans le pays d’origine de mon père et de mon grand-père.

Mon mari travaille en indépendant, il pouvait continuer son activité professionnelle depuis Rome. Pour mon fils, qui avait dix ans à l’époque, ce fut plus difficile. Il devait quitter ses ami-e-s, vivre et étudier dans un pays dont il ne parlait pas la langue. Huit ans plus tard, mon fils est le plus Italien de nous tous. Il vient de passer son bac, il est parfaitement italophone et germanophone.

Toute la Suisse dans un jardin

Rome, je l’aimais, mais je la connaissais en touriste. Ce qui comptait pour moi, c’était de vivre en Italie. Et plus encore de travailler pour l’Istituto svizzero, et au cœur de cet institut, dans ce lieu hors du commun qu’est la Villa Maraini. La maison a une longue histoire, passant de propriété familiale et privée à une mission publique, dans une des plus grandes capitales européennes.

Quand nous arrivons à Rome, l’appartement dans lequel nous allions habiter n’est pas prêt. Nous avons vécu six mois dans la Villa, ce qui m’a permis de la vivre de l’intérieur. Nous étions en août, la ville somnolait, cela m’a permis de me préparer à la réalisation de mes objectifs et de commencer à dépoussiérer un peu les habitudes. Je me suis aussi plongée dans la vie romaine. J’acceptais toutes les invitations! Aujourd’hui, je suis plus sélective, je connais les partenaires important-e-s et les relations qu’il est nécessaire de tisser.

Je suis en contact étroit avec tous les autres instituts européens et internationaux qui siègent à Rome, je préside d’ailleurs l’Union internationale. Mais, de manière surprenante, j’ai aussi développé à Rome une meilleure connaissance de mon propre pays, plus encore qu’à l’époque où je travaillais aux affaires culturelles à Genève.

Ce travail m’a permis de nouer des contacts avec les autorités fédérales, qui subventionnent une grande partie de l’institut. Plusieurs conseillers-ères fédéraux y sont passé-e-s, cette année, notamment la présidente Viola Amherd. Nous collaborons étroitement avec le Tessin pour la défense de l’Italianità et de la culture italophone de la Suisse. Nous travaillons avec l’ambassade, recevons des délégations, mais surtout nous accueillons chaque année quinze à vingt chercheuses, chercheurs, artistes et scientifiques sélectionné-e-s pour vivre et travailler à l’institut.

Rome, ville ouverte

Vivre à Rome consiste à accepter le chaos permanent. Il faut en faire l’expérience, s’y plonger et intégrer cet environnement. Puis prendre appui sur tous les éléments extraordinaires qui n’existent qu’à Rome tels que l’histoire, la beauté de la ville, la lumière, le sens de l’accueil de la population, le cosmopolitisme. En quelques années, je me suis fait beaucoup d’ami-e-s dans le monde culturel et scientifique à travers l’Istituto, mais aussi liés à l’école de mon fils, l’école suisse de Rome.

L’ISR se situe dans un des beaux quartiers du centre-ville, pas très loin de la Piazza di Spagna, et la Villa Maraini est entourée d’un jardin luxuriant. La moitié des résident-e-s est issue du monde académique, de la recherche, et vient ici avec des projets liés à Rome, souvent pour l’accès aux grandes bibliothèques, aux archives, du Vatican par exemple. Les autres sont des artistes et se portent candidat-e-s pour mener un projet original.

C’est un immense bonheur pour moi de leur permettre d’avancer dans leurs recherches de la meilleure des manières possibles, d’être là pour faciliter leur séjour, de les connecter au monde académique ou culturel romain et suisse, de les faire connaître au public italien, et de montrer l’excellence de la recherche et de la création de notre pays.

Du public, des expos

Nous avons aussi développé de nouveaux programmes, en ouvrant des résidences à Palerme et à Milan, dans un tracé qui va du nord au sud.

Pendant ce temps suspendu de la résidence, les artistes, les chercheuses et les chercheurs travaillent ensemble, sortent de leurs spécialisations, se penchent sur les grands défis de notre société. Ils et elles rencontrent des pairs et des résident-e-s «seniors» dans un échange intergénérationnel que nous avons mis en place avec des artistes confirmé-e-s et des chercheurs-euses et professeur-e-s qui participent à la vie communautaire.

De ce travail, on fait des conférences publiques ou des événements. Pendant l’été, nous accueillons les universités et hautes écoles suisses pour des académies d’été avec des thèmes transdisciplinaires.

Toutes ces questions contemporaines s’ajoutent à la tradition romaine des humanités, ainsi nous contribuons à ce que ce savoir-faire humaniste perdure. Et à Rome, ce travail est reconnu.

L’institut est considéré comme lieu fort de l’art contemporain en Italie. On propose deux grandes expositions, des concerts très suivis, plus de 35’000 spectateur-ice-s chaque année. Le lieu est ouvert du mercredi au dimanche après-midi. Le public profite de l’endroit et des événements, toute la programmation est gratuite.

Je dois bien sûr penser au retour. Je vais revivre à Genève un de ces jours, c’est la ville où j’ai grandi, où habite une partie de ma famille, j’y reviendrai avec plaisir. Mais je suis sûre que restera une nostalgie, de l’Italie, de Rome en particulier, et enfin de cette institution unique qu’est l’Istituto svizzero.

L’ISR en quelques mots

La Villa Maraini. © DANIELE MOLAJOLI

En 1945, la comtesse Maraini, née Sommaruga, veuve d’Emilio Maraini, un industriel tessinois qui a fait fortune dans la betterave sucrière, annonce à la Confédération suisse qu’elle souhaite lui léguer sa belle villa romaine pour en faire un centre culturel. Ainsi naît l’Institut suisse de Rome, fêté officiellement en 1949, dont la mission est d’encourager la collaboration scientifique et artistique entre la Suisse et l’Italie.

Depuis les années 1970, l’institut accueille pour l’année académique une douzaine d’artistes et scientifiques venant de toutes les régions de Suisse. Le confort des chambres et des lieux de travail est modeste (ateliers et bibliothèque), mais scientifiques et artistes sont logé-e-s et nourri-e-s dans la propriété, ils et elles peuvent profiter de leur temps pour travailler et dialoguer.

L’institut propose en outre des concerts, expositions ou séminaires destinés au public local et suisse. Depuis la fin des années 90, un espace a été ouvert à Milan, et depuis 7 ans l’Istituto offre résidences et activités à Palerme. L’ISR est une fondation de droit privé, financée par le Secrétariat d’État à la formation, à la recherche et à l’innovation et par Pro Helvetia.


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