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Cinéma et théâtre

Guerre à Gaza: Comment le monde artistique se mobilise

Guerre a gaza comment le monde artistique se mobilise

Le 20 mai 2024, la comédienne Cate Blanchett portait une robe noire, blanche et doublée de vert au Festival de Cannes, qui rappelait ouvertement les couleurs du drapeau palestinien.

© GETTY IMAGES/GISELA SCHOBER

Malgré les règles qui interdisent tout message politique, le grand rendez-vous du cinéma à Cannes qui s’est clos le samedi 25 mai 2024 a été le théâtre de différentes prises de position symboliques qui touchent au conflit israélo-palestinien. Lundi 20 mai 2024, la comédienne australo-américaine Cate Blanchett portait une robe, noire, blanche et doublée de vert, qui rappelait ouvertement les couleurs du drapeau palestinien. Le 15 mai 2024, l’actrice Leïla Bekhti arborait une broche en forme de pastèque, symbole de la résistance palestinienne après la guerre des Six Jours, en 1967.

Leïla Bekhti et sa broche en forme de pastèque. © GETTY IMAGES/MARC PIASECKI

Bella Hadid en keffieh

Le 23 mai 2024, la mannequin américaine d’origine palestinienne Bella Hadid sortait de son hôtel avec une tenue rouge et blanche en keffieh, autre hommage aux victimes des bombes israéliennes.

Bella Hadid au Festival de Cannes. © GETTY IMAGES/JACOPO RAULE

Et la Franco-Israélienne Laura Blajman-Kadar, rescapée du massacre du 7 octobre 2023, a foulé le tapis rouge du festival avec une robe sur laquelle le monde entier a pu voir des visages d’otages israélien-ne-s- toujours détenu-e-s par le Hamas pour demander leur libération alors que l’acteur Philippe Torreton avait accroché un ruban jaune à sa veste, le 14 mai 2024, pour les mêmes raisons.

La Franco-Israélienne Laura Blajman-Kadar, rescapée du massacre du 7 octobre 2023. © AFP/VALERY HACHE

Entendre la voix de la Palestine

Et en Suisse? Pas de tapis rouge chic, mais du 31 mai au 2 juin 2024, le Théâtre de Vidy à Lausanne organise trois jours de rencontres artistiques autour de la Palestine. Pour son directeur Vincent Baudriller, il est important qu’un théâtre entre en résonance avec l’actualité du monde et fasse entendre la parole d’artistes originaires de la Palestine. L’institution du bord de l’eau présente un spectacle, des films, et des discussions à l’issue des représentations.

«Ces productions ont une histoire», explique Vincent Baudriller. La pièce Le métro de Gaza est jouée par des actrices et acteurs palestiniens qui viennent du «Freedom Theater» de Jénine. Fondé en 1953, sur le camp aux abords de la ville, le lieu servait de reconstruction pour les jeunes victimes de choc post-traumatique de la première intifada. Il devient théâtre dans les années 90, puis la maison est détruite par les bombes en 2002, et le fils de la fondatrice est assassiné en 2011. «Je trouve important que cette histoire soit connue et discutée.» Le programme cinéma est lui composé d’images faites par des réalisatrices et des réalisateurs gazaouis.

«Ce sont des films qui ont été tournés à Gaza et constituent un témoignage de ce qui s’y passe alors que les journalistes ne peuvent plus y travailler ou y meurent (une centaine de morts depuis octobre 2023, ndlr) ainsi que de nombreux humanitaires (près de 140 morts depuis octobre 2023, ndlr).»

Solidarité en silence

Jacob Berger sera présent à Vidy lui aussi. Il a lancé avec d’autres réalisatrices et réalisateurs tels que Nicolas Wadimoff, Dominique Ziegler ou Stina Werenfels plusieurs pétitions signées par des personnalités du monde artistique demandant un cessez-le-feu et le respect des conventions internationales. Considère-t-il que le monde culturel se mobilise suffisamment pour faire entendre la voix de la paix?

«On sent un énorme mouvement, répond-il, comme je n’en avais jamais vu depuis des années. Plus de 1000 personnes ont signé notre appel dont des artistes suisses de grande renommée.

En Suisse alémanique c’est plus difficile, la perception ressemble à celle qui prévaut en Allemagne: le souvenir du grand crime du XXe siècle est encore si présent, compte si fort qu’il l’emporte sur tout, y compris la dénonciation des pires excès d’Israël. Les cinéastes Samir et Stina Werenfels, pourtant d’origine juive, sont très vite dénoncé-e-s comme antisémites quand ils et elles font entendre une voix critique.»

Rayonnement international

Les manifestations symboliques des personnalités sous les ors du festival cannois ont-elles un impact sur l’opinion publique? «Chacun-e fait ce qu’il peut avec sa conscience, constate Vincent Baudriller. Tant mieux si des personnalités ayant un rayonnement international permettent de sensibiliser et qu’ensuite les gens puissent comprendre non seulement les tragiques événements récents mais aussi l’histoire, se rappeler que les camps existent désormais pour quatre générations, que cela joue sur le récit collectif.

L’opinion publique peut peut-être faire bouger les gouvernements.

C’est frivole, c’est juste un geste, mais on en parle, et par conséquent, on évite l’indifférence, on se rend compte de la complexité des choses.»

Vincent Baudriller, directeur du Théâtre de Vidy. © FLORIAN CELLA

Quand Jacob Berger s’est rendu à Cannes, il a porté un petit drapeau palestinien à sa boutonnière:

«C'est incroyable le nombre de personnes qui m’ont remercié, qui m’ont félicité. Beaucoup d’artistes sont horrifié-e-s mais n’osent pas s’exprimer. Je ressentais la solidarité des silencieux-euses. Ça rappelle l’époque de la chasse aux sorcières, dans les années 50.»

Le père et la mère de Jacob Berger sont d’origine juive, une partie de la famille de sa grand-mère est morte dans les camps. Ses parents n’en faisaient pas état, lui s’intéresse à ses racines, considère qu’elles font partie de son héritage. En 2017, il sort le magnifique film Un juif pour l’exemple, d’après le roman de Jacques Chessex qui raconte un meurtre antisémite à Payerne, en 1942.

«Ce qui se passe à Gaza aujourd’hui nous disqualifie tous, disqualifie ce contre quoi nous nous sommes engagés, aux yeux de la nouvelle génération qui n’est pas née comme nous avec la tragédie de la Deuxième Guerre mondiale, et pour qui c’est le «premier génocide.» Cette présence de la violence, cette façon qu’a Israël de punir collectivement fait énormément de mal aux juif-ve-s, et montre à quel point le pays est traversé par le mensonge et la corruption.»

Rencontres artistiques autour de la Palestine, du 31 mai au 2 juin 2024 au Théatre de Vidy.

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